Cette fois-ci c'est à mon tour de vous raconter mes mois de décembre et janvier. Après qu'Eléa soit partie pour Sydney, je suis resté à Darwin en attendant des nouvelles d'une ferme de la région (région au sens large puisqu'elle est éloignée de 180 km). Après avoir passer une série de tests physiques, psychologiques et urinaire (le plus difficile puisque j'ai passé 2 heures à faire des allers-retours entre les toilettes et la fontaine d'eau minérale), j'ai pu rejoindre la Belle Downs Station, une ferme d'élevage bovin.
Dure la nature
Le « Northern Territory »
n'est pas une région très tendre pas nature, le climat tropical
permet le développement d'une faune et d'une flore assez
impressionnante. Toute vie est rythmée par les deux saison : la
« cool saison », c'est-à-dire les 6 mois de l'année où
Darwin (la capitale) redevient vivable et attire les touristes, et la
« wet saison », la pire, celle qui fait jaillir du ciel
des trombes d'eaux, des orages et un soleil de plomb (le tout en
quelques minutes d'intervalles), qui inonde tous les prés et créé
des marécages où insectes, grenouilles, crocodiles et autres
sympathiques bestioles prolifèrent. C'est sans l'ombre d'un doute
que j'ai « choisi » le milieu de cette saison humide pour
découvrir ce coin de paradis.
Les « paddocks » ou prés
de la ferme sont en réalité d'immenses parcelles de terre en friche
que traversent des rangées de fils barbelés. La nature conserve la
majeure partie de ses droits et les champs sont peuplés d'animaux de
toutes sortes où les bovins représentent une minorité parmi
d'autres.
Quelques piqures... |
Les insectes : ils ressemblent
pour la plupart à leurs cousins européens mais de taille trois à
quatre fois supérieures. La plupart d'entre eux piquent, le reste
mord... Il existe une quantité de mouches/taons impressionnante, qui
vont jusqu'à mesurer 4 centimètres et porter une carapace aux
couleurs de l'arc-en-ciel.
Les crocodiles : Bien que le plus
grand que j'ai pu voir mesurait tout juste un mètre, il est courant
d'en croiser un lorsque l'on va réparer les barrières. C'est en
partie pour cela que les fermes utilisent des hélicoptères pour
surveiller les marais. Durant la saison humide, la plupart des
étendues d'eaux sont interdites à la baignade afin d'éviter de
nourrir ces délicats estomacs à courtes pattes.
Les kangourous et wallabys (le même en
petit) : ils sont partout ! Il est presque impossible de
faire plus d'un kilomètre sans en croiser un. Et ils ont tendance à
se jeter sous les roues des véhicules quand ils l'entendent
approcher... Heureusement que je suis un As du volant ! :P
Les cochons sauvages : ils
ressemblent à des sangliers et peuvent être vraiment énormes.
Certains australiens les chassent (ou plutôt prennent en photos
leurs chiens en train de chasser), et quand ils ont la chance d'en
attraper un gros, ils gardent les défenses comme trophée. Et f***
the planet !
Les dingos : plus ou moins des
chiens sauvages, ils ont le même problème que les loups européens
des siècles derniers : ils sont encore trop nombreux pour être
protégés et trop carnivores pour faire ami-ami avec les fermiers.
Ces derniers leur vouent une haine féroce et ne manquent jamais une
occasion de tenter d'en écraser un sur la route.
Les vaches : c'est un peu pour
elles qu'on est là. Si la plupart du temps elles suivent nos
consignes, il leur arrive de s’énerver (mais c'est là que ça
devient excitant comme le dit Tim). Il faut alors faire preuve de
patience/pédagogie/courage (se placer devant la porte et jouer le
toréador)/vitesse (pour sauter sur la barrière)/claques dans le
museau selon le cas.
Les « buffalos » : de
loin les buffles ressemblent plus ou moins aux vaches, leur caractère
sauvage mis à part. De plus près ils sont beaucoup plus trapus (je
ne suis pas sur qu'ils soient plus hauts que larges) et ont de
grandes cornes recourbées. Les trois que nous avons trouvé étaient
sûrement là avant qu'on les enferme dans les enclos, alors ils se
sont un peu demandé se qui se passait quand ils se sont retrouvé
dans les yards avec 600 vaches.
Les chiens : ici un chien est un
outil/collègue comme un autre, ils sont pour la plupart dressés
pour diriger les troupeaux, et même si la plupart du temps ils nous
gênent plus qu'autre chose, ils peuvent être utiles face à un
taureau particulièrement cornu.
L'équipe
Tim est le manager de la ferme « La
Belle Downs », qui appartient à la Australian Agricultural
Compagny. Il habite sur place avec sa femme Ruth, qui s'occupe du
travail administratif, et leur fils George, 4 ans, qui est bien
occupé lui aussi à faire le tour de la propriété en tricycle.
Leesa, ancienne pâtissière, s'occupe
du jardin et surtout de nous nourrir 4 fois par jour.
Le régime du fermier est un régime
protéiné :
Le « breaky » servit à 5h
est composé de deux œufs (brouillés, bouillis ou à la poêle) sur
des toasts beurrés et accompagnés de bacon, saucisses de bœuf ou
bœuf tout court (l'aliment de base).
L'indispensable « smoko »
est servi à 9h30, et permet de redonner un peu d’énergie
(pâtisseries salées, gâteaux et fruits) avant le lunch, c'est à
dire un sandwich (bœuf ou corned bœuf) sur les coups de 13h. Nous
prenons notre dîner (bœuf en sauce) vers 19h.
Cela nous permet de travailler à
mi-temps : 12h par jour (jusqu'à 14h), 13 jours sur 14 (je n'ai
pas osé parler de nos 35 heures françaises). Faire des journées
aussi longues s'est avéré plutôt difficile mais la compensation :
un lever et un coucher de soleil sur la campagne exotique tous les jours.
Le boulot
L’élevage en Australie : en général les fermes du Sud du Queensland (Solferino) sont spécialisées dans la fécondation des vaches et l'élevage des veaux. Ces derniers sont plus tard envoyés vers le Nord (La Belle Downs) pour être
engraissés et vendus à des abattoirs sur place ou exportés.
Les troupeaux sont achetés par la ferme La Belle autour du
mois de mai, et ils y restent avant d'être revendus
et embarqués dans des camions entre décembre et février.
C'est là que j'interviens : afin
de vider les champs, la ferme fait appel à des hélicoptères pour
aller chercher les troupeaux les plus éloignés. Puis, montés sur
des quads nous, fermiers du plancher des vaches, poussons ces
troupeaux dans les « Yards » c'est-à-dire de
(relativement) petits enclos.
Les Yards sont une suite d’enclos de
plus en plus petits qui débouchent sur un couloir. Le but du jeu est
de faire passer les bêtes par petits groupes d’enclos en enclos
afin de les faire sortir du couloir une par une.
Cela permet de charger les camions qui
emmènent les troupeaux vers leurs nouveaux propriétaire. Nous
passons également beaucoup de temps à les peser, les trier selon
l'age, le sexe, le poids... afin de préparer les futurs chargements.
La principale chose que nous faisons
est travailler dans les Yards, mais il y a beaucoup de choses à
faire autour.
Le mustering : il s'agit de
déplacer les troupeaux d'un pré à un autre, cela se fait
généralement avec une ou deux autres personnes, mais parfois seul,
et monté sur un quad ou tout autre engin capable de battre à la
course une vache sur tout terrain.
Le fencing : certains spécimens
ont la fâcheuse manie de foncer régulièrement dans les barbelés
(on se demande pourquoi d'ailleurs). Nous devons donc vérifier
l'état des clôtures régulièrement et si besoin, les réparer avec
une bonne pince et quelques brins de fil de fer. On utilise
généralement l'Argo, un véhicule à 8 roues motrice qui peut
(presque) avancer dans l'eau et flotte relativement bien. C'est
plutôt utile pour traverser certains marécages même si il faut
éviter les crocodiles autant que possible.
Le cleaning : entre deux semaines
de chargement de camion, nous avons généralement quelques jours
pour souffler un peu et nous faisons un peu de tout pour passer le
temps. Ça consiste à ranger tout ce que nous utilisons en vitesse
sans remettre à sa place, trier les pinces, les vis et les clés par
ordre de taille (en mm et en pouce), ramasser le crottin des chevaux
qui n'ont pas trouvé de meilleur trône qu'au milieu du garage.
Le welding : c'est-à-dire la
soudure. A 150 km du prochain village, il faut savoir se débrouiller
par nous même et réparer la plupart des outils, bâtiments et
barrières. Et puis c'est fou ce tic qu'on les taureaux de toujours
vouloir briser tout ce qu'ils trouvent.
Le spraying : nous avons dut, la
dernière semaine, asperger un champ d'herbes hautes. L'un de nous
conduit un 4x4 entre des rangées d'arbres tandis que l'autre est
monté sur une citerne-pompe à incendie à l'arrière et met le
produit sur le sol en évitant les arbres.
Le insecticide spraying : de temps
en temps, quand nous en avons marre de nous faire assaillir par les
moustiques et Cie (comme je l'ai dit, tout pique ou mord), j'asperge
les murs et toits autour des habitations. Pour cela je porte une
machine sur le dos (l'équivalent d'un moteur de tondeuse à gazon et
un réservoir d'une vingtaine de litres) qui fait un peu penser à
une machine volante, mais je dois malheureusement me contenter de
marcher avec.
Le destroying : c'est sans doute
l'une des activités les plus funs que j'ai faite. Nous devions
démonter une maison (construite essentiellement en bois/clous/tôle,
comme beaucoup de bâtiments ici). Du coup on l'a détruite petit
-à-petit à coups de marteau, masse et pied-de-biche. C'est plutôt
impressionnant de voir s'écrouler un mur entier au sol rien qu'en
poussant dessus.
Le driving : l'apprentissage façon
Tim (le manager) ce résume à ça « Tu l'as déjà conduit ?
Non ? C'est pas grave, prends le volant quand même. » Du
coup j'ai eu la chance d'essayer à peu près toutes les machines de
la ferme.
Les « utes » sont les
voitures tous terrains, on les utilise pour aller sur la route
publique (il n'y en a qu'une), transporter et tirer tout et n'importe
quoi.
Le tracteur
permet de soulever tout et n'importe quoi, on y accroche aussi une
remorque pour tondre la pelouse (le « jardin » s'étend
sur plusieurs kilomètres carrés).
Le « bobcat » est un
tracteur compact, qui permet également de porter tout et n'importe
quoi ; il est monté sur chenilles ce qui le rend plus lent mais
plus difficile à s'enliser (en fait je ne sais pas ce qu'on fait si
ça arrive) ; enfin ça permet, avec le tracteur et un peu de
coordination, de soulever la benne à l'arrière du camion qui permet
de transporter des vaches.
Bien je me sois rarement ennuyé, après deux mois de travail j'ai été content de pouvoir partir et rejoindre Eléa. Nous nous sommes retrouvé à Mackay, dans la famille où elle était au pair, avant de partir à Sydney et s'envoler pour l'Asie. Pour suivre ces aventures qui promettent d'être palpitantes, retrouvez-nous bientôt sur ce blog !
Cheeeeers !
B
Une tenue de fermier après une journée dans les Yards |
Après une semaine de travail... |
Et voilà ce qui nous permet d'avoir du steak tous les jours... |
Petite dédicace à Jamie |
Les chutes d'eau de Wangi |
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