jeudi 19 février 2015

Deux mois dans une ferme du Territoire du Nord


Cette fois-ci c'est à mon tour de vous raconter mes mois de décembre et janvier. Après qu'Eléa soit partie pour Sydney, je suis resté à Darwin en attendant des nouvelles d'une ferme de la région (région au sens large puisqu'elle est éloignée de 180 km). Après avoir passer une série de tests physiques, psychologiques et urinaire (le plus difficile puisque j'ai passé 2 heures à faire des allers-retours entre les toilettes et la fontaine d'eau minérale), j'ai pu rejoindre la Belle Downs Station, une ferme d'élevage bovin.

Dure la nature

Le « Northern Territory » n'est pas une région très tendre pas nature, le climat tropical permet le développement d'une faune et d'une flore assez impressionnante. Toute vie est rythmée par les deux saison : la « cool saison », c'est-à-dire les 6 mois de l'année où Darwin (la capitale) redevient vivable et attire les touristes, et la « wet saison », la pire, celle qui fait jaillir du ciel des trombes d'eaux, des orages et un soleil de plomb (le tout en quelques minutes d'intervalles), qui inonde tous les prés et créé des marécages où insectes, grenouilles, crocodiles et autres sympathiques bestioles prolifèrent. C'est sans l'ombre d'un doute que j'ai « choisi » le milieu de cette saison humide pour découvrir ce coin de paradis.

Les « paddocks » ou prés de la ferme sont en réalité d'immenses parcelles de terre en friche que traversent des rangées de fils barbelés. La nature conserve la majeure partie de ses droits et les champs sont peuplés d'animaux de toutes sortes où les bovins représentent une minorité parmi d'autres.




Quelques piqures...

Les insectes : ils ressemblent pour la plupart à leurs cousins européens mais de taille trois à quatre fois supérieures. La plupart d'entre eux piquent, le reste mord... Il existe une quantité de mouches/taons impressionnante, qui vont jusqu'à mesurer 4 centimètres et porter une carapace aux couleurs de l'arc-en-ciel.



Les crocodiles : Bien que le plus grand que j'ai pu voir mesurait tout juste un mètre, il est courant d'en croiser un lorsque l'on va réparer les barrières. C'est en partie pour cela que les fermes utilisent des hélicoptères pour surveiller les marais. Durant la saison humide, la plupart des étendues d'eaux sont interdites à la baignade afin d'éviter de nourrir ces délicats estomacs à courtes pattes.

Les kangourous et wallabys (le même en petit) : ils sont partout ! Il est presque impossible de faire plus d'un kilomètre sans en croiser un. Et ils ont tendance à se jeter sous les roues des véhicules quand ils l'entendent approcher... Heureusement que je suis un As du volant ! :P

Les cochons sauvages : ils ressemblent à des sangliers et peuvent être vraiment énormes. Certains australiens les chassent (ou plutôt prennent en photos leurs chiens en train de chasser), et quand ils ont la chance d'en attraper un gros, ils gardent les défenses comme trophée. Et f*** the planet !

Les dingos : plus ou moins des chiens sauvages, ils ont le même problème que les loups européens des siècles derniers : ils sont encore trop nombreux pour être protégés et trop carnivores pour faire ami-ami avec les fermiers. Ces derniers leur vouent une haine féroce et ne manquent jamais une occasion de tenter d'en écraser un sur la route.

Les vaches : c'est un peu pour elles qu'on est là. Si la plupart du temps elles suivent nos consignes, il leur arrive de s’énerver (mais c'est là que ça devient excitant comme le dit Tim). Il faut alors faire preuve de patience/pédagogie/courage (se placer devant la porte et jouer le toréador)/vitesse (pour sauter sur la barrière)/claques dans le museau selon le cas.

Les « buffalos » : de loin les buffles ressemblent plus ou moins aux vaches, leur caractère sauvage mis à part. De plus près ils sont beaucoup plus trapus (je ne suis pas sur qu'ils soient plus hauts que larges) et ont de grandes cornes recourbées. Les trois que nous avons trouvé étaient sûrement là avant qu'on les enferme dans les enclos, alors ils se sont un peu demandé se qui se passait quand ils se sont retrouvé dans les yards avec 600 vaches.

Les chiens : ici un chien est un outil/collègue comme un autre, ils sont pour la plupart dressés pour diriger les troupeaux, et même si la plupart du temps ils nous gênent plus qu'autre chose, ils peuvent être utiles face à un taureau particulièrement cornu.


L'équipe



Pour la première fois de toutes mes expériences en Australie, l'anglais est la seule langue parlée : l'équipe est composé de Came (le superviseur), qui vient d'une ferme du Queensland, Nick de Sydney, Gaby qui est venue d'Angleterre avec un visa Working&Holiday et qui est maintenant sponsorisée par la ferme, Jamie et Sam, deux backpackers anglais. Les seuls mots français utilisés ici sont : « bonjour », « bonsoir » et « merci » (utilisés indistinctement) et « voulezvouscoucheravecmoicesoir ».

Tim est le manager de la ferme « La Belle Downs », qui appartient à la Australian Agricultural Compagny. Il habite sur place avec sa femme Ruth, qui s'occupe du travail administratif, et leur fils George, 4 ans, qui est bien occupé lui aussi à faire le tour de la propriété en tricycle.
Leesa, ancienne pâtissière, s'occupe du jardin et surtout de nous nourrir 4 fois par jour.
Le régime du fermier est un régime protéiné :
Le « breaky » servit à 5h est composé de deux œufs (brouillés, bouillis ou à la poêle) sur des toasts beurrés et accompagnés de bacon, saucisses de bœuf ou bœuf tout court (l'aliment de base).
L'indispensable « smoko » est servi à 9h30, et permet de redonner un peu d’énergie (pâtisseries salées, gâteaux et fruits) avant le lunch, c'est à dire un sandwich (bœuf ou corned bœuf) sur les coups de 13h. Nous prenons notre dîner (bœuf en sauce) vers 19h.
Cela nous permet de travailler à mi-temps : 12h par jour (jusqu'à 14h), 13 jours sur 14 (je n'ai pas osé parler de nos 35 heures françaises). Faire des journées aussi longues s'est avéré plutôt difficile mais la compensation : un lever et un coucher de soleil sur la campagne exotique tous les jours.



Le boulot

L’élevage en Australie : en général les fermes du Sud du Queensland (Solferino) sont spécialisées dans la fécondation des vaches et l'élevage des veaux. Ces derniers sont plus tard envoyés vers le Nord (La Belle Downs) pour être engraissés et vendus à des abattoirs sur place ou exportés.
Les troupeaux sont achetés par la ferme La Belle autour du mois de mai, et ils y restent avant d'être revendus et embarqués dans des camions entre décembre et février.

C'est là que j'interviens : afin de vider les champs, la ferme fait appel à des hélicoptères pour aller chercher les troupeaux les plus éloignés. Puis, montés sur des quads nous, fermiers du plancher des vaches, poussons ces troupeaux dans les « Yards » c'est-à-dire de (relativement) petits enclos.

Les Yards sont une suite d’enclos de plus en plus petits qui débouchent sur un couloir. Le but du jeu est de faire passer les bêtes par petits groupes d’enclos en enclos afin de les faire sortir du couloir une par une.

Cela permet de charger les camions qui emmènent les troupeaux vers leurs nouveaux propriétaire. Nous passons également beaucoup de temps à les peser, les trier selon l'age, le sexe, le poids... afin de préparer les futurs chargements.

La principale chose que nous faisons est travailler dans les Yards, mais il y a beaucoup de choses à faire autour.

Le mustering : il s'agit de déplacer les troupeaux d'un pré à un autre, cela se fait généralement avec une ou deux autres personnes, mais parfois seul, et monté sur un quad ou tout autre engin capable de battre à la course une vache sur tout terrain.

Le fencing : certains spécimens ont la fâcheuse manie de foncer régulièrement dans les barbelés (on se demande pourquoi d'ailleurs). Nous devons donc vérifier l'état des clôtures régulièrement et si besoin, les réparer avec une bonne pince et quelques brins de fil de fer. On utilise généralement l'Argo, un véhicule à 8 roues motrice qui peut (presque) avancer dans l'eau et flotte relativement bien. C'est plutôt utile pour traverser certains marécages même si il faut éviter les crocodiles autant que possible.

Le cleaning : entre deux semaines de chargement de camion, nous avons généralement quelques jours pour souffler un peu et nous faisons un peu de tout pour passer le temps. Ça consiste à ranger tout ce que nous utilisons en vitesse sans remettre à sa place, trier les pinces, les vis et les clés par ordre de taille (en mm et en pouce), ramasser le crottin des chevaux qui n'ont pas trouvé de meilleur trône qu'au milieu du garage.





Le welding : c'est-à-dire la soudure. A 150 km du prochain village, il faut savoir se débrouiller par nous même et réparer la plupart des outils, bâtiments et barrières. Et puis c'est fou ce tic qu'on les taureaux de toujours vouloir briser tout ce qu'ils trouvent.







Le spraying : nous avons dut, la dernière semaine, asperger un champ d'herbes hautes. L'un de nous conduit un 4x4 entre des rangées d'arbres tandis que l'autre est monté sur une citerne-pompe à incendie à l'arrière et met le produit sur le sol en évitant les arbres.

Le insecticide spraying : de temps en temps, quand nous en avons marre de nous faire assaillir par les moustiques et Cie (comme je l'ai dit, tout pique ou mord), j'asperge les murs et toits autour des habitations. Pour cela je porte une machine sur le dos (l'équivalent d'un moteur de tondeuse à gazon et un réservoir d'une vingtaine de litres) qui fait un peu penser à une machine volante, mais je dois malheureusement me contenter de marcher avec.

Le destroying : c'est sans doute l'une des activités les plus funs que j'ai faite. Nous devions démonter une maison (construite essentiellement en bois/clous/tôle, comme beaucoup de bâtiments ici). Du coup on l'a détruite petit -à-petit à coups de marteau, masse et pied-de-biche. C'est plutôt impressionnant de voir s'écrouler un mur entier au sol rien qu'en poussant dessus.

Le driving : l'apprentissage façon Tim (le manager) ce résume à ça « Tu l'as déjà conduit ? Non ? C'est pas grave, prends le volant quand même. » Du coup j'ai eu la chance d'essayer à peu près toutes les machines de la ferme.









Les « utes » sont les voitures tous terrains, on les utilise pour aller sur la route publique (il n'y en a qu'une), transporter et tirer tout et n'importe quoi.













Les quads sont beaucoup plus maniables, on les utilise essentiellement pour le mustering et de temps en temps pour transporter un petit veau trop jeune pour galoper, on le place alors juste derrière le guidon, avec deux pattes de chaque coté de la selle.









L'« argo » est le véhicule qui peut également flotter sur l'eau, il n'est ni très maniable (8 roues) ni très rapide (20km/h sur terre et 5 sur eau), mais reste pratique, ne pas oublier de prendre un bidon d'essence en cas de panne...







Le tracteur permet de soulever tout et n'importe quoi, on y accroche aussi une remorque pour tondre la pelouse (le « jardin » s'étend sur plusieurs kilomètres carrés).










Le « bobcat » est un tracteur compact, qui permet également de porter tout et n'importe quoi ; il est monté sur chenilles ce qui le rend plus lent mais plus difficile à s'enliser (en fait je ne sais pas ce qu'on fait si ça arrive) ; enfin ça permet, avec le tracteur et un peu de coordination, de soulever la benne à l'arrière du camion qui permet de transporter des vaches.












 Bien je me sois rarement ennuyé, après deux mois de travail j'ai été content de pouvoir partir et rejoindre Eléa. Nous nous sommes retrouvé à Mackay, dans la famille où elle était au pair, avant de partir à Sydney et s'envoler pour l'Asie. Pour suivre ces aventures qui promettent d'être palpitantes, retrouvez-nous bientôt sur ce blog !

Cheeeeers !


B


Une tenue de fermier après une journée dans les Yards
Après une semaine de travail...
Et voilà ce qui nous permet d'avoir du steak tous les jours...
Petite dédicace à Jamie
Les chutes d'eau de Wangi

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